Cognitio dei experimentalis

(i) L’idée qu’une créature puisse être sans témoin paraît inconcevable — non seulement un être humain, ou un être vivant, mais aussi bien une flaque de pluie dont le vent ride la surface, ou une pièce de métal abandonnée au bord d’une route de montagne, en plein midi.

(ii) Telle créature singulière dont le hasard fait que je sois le témoin, creuse en perspective l’intuition de toutes celles qui sont ignorées de nous.

(iii) Chacune des créatures dont je pressens l’existence, du moment qu’elle existe, revêt nécessairement une forme dont la précision du détail des lignes sculpte l'écriture du nom imprononçable par tout autre que Lui.

(iv) Pour Dieu seul, il n’est de créature qui ne soit singulière. Lui ne connaît pas les arbres de la forêt mais chacun d’entre eux en particulier, et de même pour les oiseaux du ciel, et de même pour nous, à jamais, les vivants et les morts. Et chaque créature possède un nom imprononçable par tout autre que Lui, dont l’écriture se lit en silence dans l’absolue précision du détail des lignes.

(v) Les créatures proclament la gloire de Dieu (Ps 19) en même temps que chacune d’entre elles appelle sa compassion à chaque instant (Ps 145,9). Sans la vigilance de Dieu, les lignes qui composent sa forme ne tarderaient pas à s'effacer, à s'emmêler, à se perdre dans l’oubli. Grâce à Lui, au contraire, elles demeurent une écriture : celle de son nom imprononçable, par quoi se marque son être propre et qui le fonde.

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Commentaires

MRG a dit…
"Cognitio" non? Très beau, très juste, m'a fait relire les psaumes. Merci

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